Patrick Modiano a dit :
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"Je me suis aperçu que j’écrivais pratiquement toujours le même livre. Les romans changent de titre, mais on pourrait supprimer les titres et cela ferait un seul livre. Un peu comme une musique où il y a des motifs qui reviennent et forment un tout.
J’ai toujours pensé que le passé, ou le temps qui s’écoule, est une masse d’oubli où ressurgissent quelques petites bribes. Ce qui occupe la mémoire, c’est un nuage d’oubli. Évidemment, il y a de temps en temps des petites bribes, des éclats qui remontent à la surface mais la principale matière, c’est quand même l’oubli.
Je voulais traduire ce qui se passe chez quelqu’un qui écrit et qui s’inspire de personnages qu’il a peut-être côtoyés dans le passé. Tous ces gens qui l’inquiétaient ou qui lui faisaient peur dans son enfance, un écrivain les neutralise en se servant d’eux pour les mettre dans un roman. Ils ne deviennent plus que des fantômes, comme s’ils étaient passés dans un monde parallèle.
J’ai toujours été attiré par le fait de supprimer beaucoup de choses dans ce que j’écrivais, pour faire des espèces de trous de silence. Certains écrivains peuvent avoir un style baroque. Moi, ma pente naturelle est de supprimer beaucoup de choses, de faire des ellipses. En littérature, il faut qu’il y ait des trouées de silence. Quand il y a trop de choses, le lecteur risque d’être étouffé. Il faut lui laisser un espace. C’est lui-même qui achève le livre, en fait."
Patrick Modiano, entretien réalisé par Ilana Moryoussef, Le Parisien, 5 octobre 2021.
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