La tradition de la bûche de Noël, par Frédéric Mistral
Dans 21 jours, c'est Noël !
Hâte de retrouver le Vieux Bonhomme ?...
Penchons-nous à nouveau sur ces festivités, bien particulières cette année. Mais difficile d'imaginer le repas de Noël sans son dessert, la bûche.
A l'origine, ce n'était bien sûr ni un gatêau ni une glace.
Mistral, le Provençal, le félibre, l'ami de Daudet, raconte les fêtes de Noël et ses traditions dans Mes origines, Mémoires et récits parus en 1906 (en Provençal et en Français !). En Provence, Noël était nommée Calèndo parce que les Calendes de janvier, fête païenne, avait été "récupérée" par les Chrétiens et finalement confondue avec la Nativité du Christ. Quant à la bûche de Noël, on la désignait par le teme de Cacho-fiò (mettre le feu) ; c'était une grosse bûche d'arbre fruitier qu'on mettait au feu en grande cérémonie, le soir de Noël.
"Fidèle aux anciens usages, pour mon père, la grande fête, c'était la veillée de Noël. Ce jour-la, les laboureurs dételaient de bonne heure (...). Et qui de-ci, et qui de-là, les serviteurs s'en allaient, pour « poser la bûche au feu », dans leur pays et dans leur maison. Au Mas ne demeuraient que les quelques pauvres hères qui n'avaient pas de famille ; et, parfois des parents, quelque vieux garçon, par exemple, arrivaient à la nuit, en disant :
« Bonnes fêtes ! Nous venons poser, cousins, la bûche au feu, avec vous autres. »
Tous ensemble, nous allions joyeusement chercher la « bûche de Noël », qui — c'était de tradition — devait être un arbre fruitier. Nous l'apportions dans le Mas, tous à la file, le plus âgé la tenant d'un bout, moi, le dernier-né, de l'autre ; trois fois, nous lui faisions faire le tour de la cuisine ; puis, arrivés devant la dalle du foyer, mon père, solennellement, répandait sur la bûche un verre de vin cuit, en disant :
Alègre ! alègre,
Mi bèus enfant, Diéu nous alègre !
Emé Calèndo tout bèn vèn…
Diéu nous fague la gràci de vèire l'an que vèn,
E se noun sian pas mai, que noun fuguen pas mens !
(Allégresse ! Allégresse,
Mes beaux enfants, que Dieu nous comble d'allégresse !
Avec Noël, tout bien vien t :
Dieu nous fasse la grâce de voir l'année prochaine.
Et, sinon plus nombreux, puissions-nous n'y pas être moins.)
Et, nous écriant tous : « Allégresse, allégresse, allégresse ! », on posait l'arbre sur les landiers et, dès que s'élançait le premier jet de flamme :
Cacho-fiò,
Bouto fiò, (A la buche, Boute feu !)
disait mon père en se signant. Et, tous, nous nous mettions à table. (...)
La veillée, en attendant la messe de minuit, était longue ce jour-là ; et longuement, autour du feu, on y parlait des ancêtres et on louait leurs actions."
Extrait et explications trouvés sur l'excellent site Lexilogos :
Noël en Provence, par Frédéric Mistral - LEXILOGOS