André Blanchard a dit (1) :

 Les retrouvailles avec un auteur que l'on aime : réflexions désabusées sur la vie, sur la littérature... Entre Jules Renard et Cioran.

"Si dans les livres étaient les réponses, la littérature serait depuis longtemps achevée.

La littérature peut se permettre ce que le reste - le bon sens, la morale, l'humanisme - réprouve et condamne. Bref, un écrivain a tous les droits, à condition d'ajouter que c'est à ses risques, et qu'il ne saurait s'en plaindre.

On connaît cela, des héros de romans qui nous sont plus proches que les voisins de palier.

La littérature fatigue l'écrivain, excepté le mauvais qui, lui, fatigue le lecteur.

Léautaud ne pouvait souffrir Suarès, lequel, selon lui, singeait la profondeur. Quant à Claudel, il ne voyait chez Suarès que "vide et mensonge". Pour autant Léautaud n'a jamais blairé Claudel, qui le lui rendait bien. Concluons qu'en littérature avoir la même tête de Turc ne saurait rabibocher deux écrivains. 

Quand on lit Proust, on est soustrait du monde, on est absent, ravi de l'être (...). Au contraire, en vient-on à songer par comparaison, quand on lit Balzac, on est immergé dans le monde, on en a jusque-là, et on biche pareil. Que la littérature puisse nous donner ces deux prouesses, ces deux exploits opposés ? -Sancto subito !"

André Blanchard (in Le reste sans changement, éditions Le Dilettante)