Christian Bobin a dit :
"Je ne sais pas pourquoi j'écris. Je sais juste que je ne peux faire autrement. Un premier mot lancé sur la page blanche - et c'est l'infini qui arrive à toute allure. J'ai une joie d'ogre à écrire. Le langage est un verre de cristal. J'aime le son qu'il rend lorsque je le heurte du bruit des doigts. Les mots sont la vibration heureuse du silence. Ecrire rafraichit les atomes de l'air, ouvre le coeur comme au matin de Pâques. Pardonnez-moi de ne parler que par images. Je suis incapable de répondre raisonnablement à des questions sur cette manie d'écrire. Je ne peux pas, comprenez-le, aller plus loin que la phrase imprimée : la commenter, ce serait l'étouffer. Somme toute, je fais confiance au lecteur : il en saura plus que moi, simplement en me lisant. Et peut-être découvrira-t-il aussi quelque chose de lui, dans le miroir de papier blanc.
Nos techniques ont supprimé le temps, en supprimant le temps, elles suppriment le coeur. Le coeur a besoin de lenteur, de secret, d'attention, de patience - toutes matières qui sont aujourd'hui plus rares que l'or, et enfouies bien plus profondément. Les livres, certains livres ressuscitent ce que le monde dans son inconscience allègre efface."
Christian Bobin (propos recueillis par Julie Cadilhac, in BSCNews, novembre 2012)