Faut-il féminiser tous les noms masculins ?
Au moment où l'on supprime la dénomination "Mademoiselle" des documents administratifs, voici un article malicieux de Jacques Drillon pour évoquer un autre changement important de sexe :
"Un mot seulement sur la féminisation des noms de fonction et de métier : écrivaines, auteures et consortes. Cela faisait rigoler Dumézil, qui faisait remarquer, derrière sa pile menaçante de bouquins, que Johnny Halliday était un chanteur, mais que c’était aussi une vedette.
(...) Un jour de 2007, sur France Culture, l’inénarrable Geneviève Fraisse a parlé des prostituées d’Amsterdam comme étant une majorité de « sans-papières ». C’était culotté. Nous fûmes un certain nombre à lui tirer notre chapelle. Les blagues de ce genre sont nombreuses, mais celle-là était la plus savoureuse. Réellement délectable, venant d’une philosophe professionnelle, élue européenne, « docteure d’Etat », professeur ici et à l’étranger, jusqu’en Amérique, où précisément on veut faire pendant à l’History en créant l’Herstory.
Aujourd’hui c’est un blogueur nommé Gérard Plaine qui nous écrit un petit mot dans lequel il propose de masculiniser certains mots, le mâle de la grenouille devenant le grenouil. Il ajoute, non sans quelque raison, qu’on devrait parler de la féminisme. Gérard Plaine est un homme distingué : il évite d’évoquer le genre qu’on donne aux organes sexuels (et sexuelles), qui semble avoir été fixé dans la plus grande anarchie, et sans plus de fermeté que le sexe des anges ; mais il aurait pu.
Nous voudrions, à cette occasion, rappeler un mot français fort utile, quoique fort rarement employé. Et c’est le mot épicène. Epicène a deux genres et même deux sens. Il désigne d’abord ce qui est à la fois mâle et femelle : la grenouille, par exemple, est un nom épicène féminin ; la grenouille femelle fait un têtard, et voilà un nom épicène masculin, car il y a des têtards mâles et des têtards femelles."
Jacques Drillon sur le site du Nouvel Obs.