Sagesse de Brassens
Sur le site Brassens2011.com, Didier Agid nous apporte son analyse :
"Don Juan est un concentré de ce que Brassens a toujours insisté pour appeler sa “petite” philosophie. Littérairement, c’est une “gradation” (figure de rhétorique d’organisation selon laquelle un discours se développe en faisant se succéder des indications de plus en plus fortes). En liturgie (…pourquoi pas ?), c’est un Gloria, un hymne qui, en latin, commence par “Gloria”. Bien que notre mécréant préféré ait affirmé que sans le latin la messe nous emmerde, il en est ici resté à la langue de Verlaine (d’ailleurs on l’imagine mal écrire une messe… sauf peut-être pour quelques moines paillards).
Chaque couplet, donc, commence par “Gloire” : à celui qui freine pour ne pas massacrer d’innocentes petites bêtes… au flic qui arrêtait la circulation pour les chats de Léautaud… “au premier venu qui passe et qui se tait” quand les autres crient “haro sur le baudet”… au curé qui sauve son ennemi le jour de la Saint-Barthélémy… au soldat qui épargne “l’otage à sa merci”… à la bonne sœur qui dégèle “dans sa main le pénis du manchot” (Brassens sera toujours Brassens)… et “Gloire à celui qui n’ayant pas d’idéal sacro-saint / Se borne à ne pas trop emmerder ses voisins”…
Ces personnages appartiennent tous à une catégorie en général bien peu épargnée par Brassens, capable du pire (sauf “celui qui n’a pas d’idéal sacro-saint“… et encore). Cependant ils ont tous choisi de basculer dans le bon camp. C’est pour cela qu’ils méritent tant de louanges. Pour, chacun à sa manière, un acte de compassion, une main tendue… Pour en arriver à un essentiel de la morale à la Brassens : se borner à “ne pas trop emmerder ses voisins”.