Un hommage à toutes nos grand-mères

A l'occasion de cette "Journée de la femme",

un souvenir pour une femme que j'aime et qui nous manque.

"Des souvenirs d'enfance ? Je n'en ai plus qu'un, au prénom de maternité, au prénom d'éternité. Marie. La Mémé. Ma Mémé.

Un large chapeau de paille, un fin ruban pour le serrer à la taille. Sous tous les soleils brûlants d’été, la Mémé promenait sa vie paisible. Mais ses yeux bleus avaient vécu tant de tourments que son sourire affichait une tendre revanche qui s’écrivait sur son visage en rides de joie.

La Mémé offrait le café aux amis de passage, des biscuits aux oiseaux en partance, et son amour tranquille aux volées d’étourneaux, aux enfants en vacances.

Cette Mémé-là, c’était la mienne. Elle est sans doute un peu la vôtre, dans une campagne charolaise qu’on pourrait croire bourbonnaise, poitevine, morvandelle ou auvergnate, et peu nous chaut la couleur de vos vaches, blanches, blondes, rousses : l’âge est une vaste province, de plus en plus reculée, où la Mémé avait pris résidence.

Nous, nous étions jeunes et frêles d’épaules. Hé mômes ! Deux asticots, flanqués d’une frangine aînée, asperge aux bras maladroits grandis trop vite, trois gosses aux yeux ouverts, au petit cœur battant contre les carreaux d’une chemise légère.

Dans son hameau poussé bien loin du bourg, comme tenu à distance des notables du Château, c’était chez la Mémé que nous vivions nos vacances d’été, dans une petite maison de pierres sèches, avec une courette regagnée par l’ivraie – Qu’importe le flacon ! Et qui dira la modestie des orties douces qui caressaient nos mollets au passage ? Un jardin délaissé, quelques marches creusées, dans la terre confortée d’une planche de bois, et tout au fond du jardin, LA cabane ! Porte verte, seau blanc à vider dans un trou, un lieu sanitaire, solitaire – Ah non, pas tout à fait : les mouches bourdonnaient autour de nous, célébrant notre offrande !

Avant l’installation pour quelques semaines, dès l’arrivée, la Mémé nous attribuait une mission sacrée que nous nous disputions : remonter les poids de la vieille horloge et remonter le temps, celui d’avant, d’avant l’eau chaude, d’avant les radiateurs, celui du temps où s’était figée la petite maison, où s’était fixée notre bonne Mémé."

(La Mémé, éditions Rhubarbe)

Comments

[veromel58]

Elles nous manquent !! Merci pour ton beau livre !! à bientôt bises