"Summertime" par Edward Hopper
Bon, c'est l'été. Edward Hopper nous en donne sa vision particulière dans cette toile datée de 1943, visible "pour de vrai" au Delaware Art Museum de Wilmington, aux Etats-Unis. Tant cette toile irradie de lumière, on a envie de mettre des lunettes fumées pour la regarder !
La chaleur est si perceptible qu'on pourrait la toucher. Mais que fait donc cette jeune femme dehors ? Provocante, quasi nue malgré la robe si légère qu'elle ne cache pas grand chose de son corps, sa poitrine, ses cuisses qu'elle offre à la ville, au toucher de cet air pesant. Chevelure rousse, bouche empourprée, pointe des seins, ces couleurs chaudes lui rendent la sensualité qu'on croyait effacée du monde par la pâleur que ce soleil aveuglant confère à cette scène.
Dans l'été de Hopper, tout est contradiction : l'horizontalité des lignes de l'escalier, du bord du trottoir, du mur croise la verticalité des colonnes et du personnage ; l'ombre fraîche et profonde de la maison par la porte ouverte contraste avec l'aveuglante blancheur des murs et du trottoir ; la raideur de la colonne qu'elle touche d'un air fier voire provocant (promesse du phallus de l'amant ?) s'oppose à l'ondulation de l'ombre de son corps sur les marches d'escalier ; l'étouffante pesanteur d'un air empesé est nié par le vent qui froisse et repousse le rideau de la deuxième fenêtre à l'image de sa robe. Sensualité, encore et toujours.
Que fait alors cette femme sur ce perron ? Attend-elle son amant, qui doit venir de notre gauche ? Et nous, passant-voyeur du côté droit, ne sommes-nous pas un peu jaloux de son manque d'intérêt pour nous ?... A l'image du carrelage entraperçu derrière elle, tout est jeu. Jeu de dame ou jeu d'échecs ?