"Petits secrets de beauté" une critique.
Un compte-rendu de nos Petits secrets de beauté :
"Avec le nombre d’ouvrages parus sur les tendances et modes de la publicité, le concept de ce recueil de publicités fin XIXe - début XXe aurait pu voir le jour plus tôt. On s’y moque de nos aïeux si crédules mais, à la vérité, en sommes nous si éloignés ?
Beaucoup
ont connu la situation du grand déménagement ou du nettoyage de
printemps ; au hasard du rangement du grenier, on retrouve un carton
contenant de la vaisselle, soigneusement emballées dans une antique
feuille de choux jaunie. Par curiosité, on jeter un coup d’œil sur ces
articles datant d’un siècle, en priorité sur les vignettes
publicitaires qui attirent le regard… Ici, des hommes en vestons et des
moustaches en guidon de vélo font la morale au lecteur incrédule : « pourquoi rester chauve quand les toupets de Simon vous redonnent la jeunesse » ? Là, une naïade plantureuse présente les résultats antigravitationnels de la pommade Seinfix.
Plus loin, des slogans plus guignolesques les uns que les autres
déclenchent rapidement l’hilarité, et le vieux journal est lu à la
volée : « Réveillez la bile de votre foie avec Jubol » !
On en lirait bien tout un livre, et voilà qui est fait : Petits secrets de beauté.
La belle collection de réclames centenaires réunies dressent un
portrait amusant des excès des publicistes d’antan : les pages
regorgent de perles. Textes et images, tout prête à rire dans ce
déballage de complexes physiques et dictats de la mode. En 1900 déjà,
les femmes veillaient à leur ligne et au moindre bouton disgracieux ;
l’homme de son côté se veut musclé… Et à chaque mal, son sirop miracle !
Le
parallèle est donc aisé entre les publicités lénifiantes du XIXe
siècle, et la niaiserie de leurs proches ancêtres. Ceux qui croyaient
avoir atteint es limites du kitch n’auront qu’à lire dans le passé : « l’été dernier j’étais un gringalet, grâce à Bullworker me voilà marié (p.95) », ou encore « un joli visage attire mais… une belle poitrine retient… (p.48) » ! Mais parfois les conseils font frémir, quand on invite à vous mettre en danger, le bon sens manque souvent aux « médecins avisés et reconnus » : « Plombez vous dents creuses vous-mêmes avec les boîtes ciment Olimpa (p.11) ».
L’ouvrage
est scindé en huit chapitres thématiques, entre désagréments
esthétiques ( plantureuse ) et catastrophes cosmétiques. Un court laïus
introduit chaque collection de réclames, dans un ton mi-badin
mi-moqueur qui n’épargne aucun jeu de mots, d’un snobisme délicieux,
comme ici « Une bonne mine : Tubes et pots, poudres et crèmes… Il
ne s’agit pas ici de desserts délicieux, mais de délicats incarnats.
Etre ou paraître jeune, intime et discret face-à-face avec soi-même
dans un miroir, pour réfléchir au développement de l’illusion
cosmétique. Ravalement de façade obligatoire : on lisse, on affine, on
assainit, on élimine, on blanchit, au tampon ouaté, au fin pinceau ou à
la truelle. Car chacune veut entrer glorieuse dans ce registre des
grâces : le beau teint mondain. (p.97) ».
Joliment mises en
page, les publicités sont tantôt seules tantôt glissées avec d’autres,
agrémenté parfois de petits commentaires amusants ou d’extraits
d’articles d’époque : « pour augmenter le volume de la poitrine :
ce ne sont pas les recettes qui manquent. Je vous recommande les bains
arsenicaux que vous pourrez prendre tous les quinze jours, dans les
proportions de cinq à six grammes d’arséniate de soude par bain. Le Cabinet de toilette d’une honnête femme, 1909 (p.47) ».
Marquées par leur époque, ces publicités reprennent souvent les styles d’alors : végétaux entrelacés façon Art Nouveau pour « la belle chevelure John Craven (p.33) », coupe garçonne et fume cigarette années 40 pour la « belle poitrine (p.52) ».
L’actualité n’est pas en reste, et les clins d’œil ne manquent pas :
ainsi de ce poilu chassant l’allemand, graphiquement comparé au sirop
chassant le microbe dans l’intestin (p.67) !
Seul point négatif
de cet ouvrage, mais hélas de taille, la couverture de bonbonnière,
dont le fond rose de « barbie » et son titre façon Elle ne
rendent pas compte de la richesse des pages intérieures. Sans parler du
sous-titre, affligeant, qui annonce un précis de blagues à deux sous.
Ce contenu original et bien choisi aurait mérité meilleur emballage…
Séverine Maréchal"
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